Une décision stratégique dans un contexte géopolitique tendu

L’administration Biden a annoncé début janvier, dans ces derniers jours pourtant, de nouvelles mesures restrictives à propos de l’exportation des puces d’intelligence artificielle développées aux États-Unis. Cette décision s’inscrit dans la continuité du CHIPS and Science Act de 2022 et a lieu à peine une semaine avant l’investiture du nouveau président, Donald Trump. L’objectif principal ? Limiter l’accès de la Chine aux technologies de pointe américaines.

Qu’est-ce que le CHIPS and Science Act ?

Le CHIPS Act a débloqué une somme colossale de 52 milliards de dollars pour raviver l’industrie américaine des semi-conducteurs. Cette nouvelle réglementation représente une extension significative de cette législation, introduisant un système de classification qui établit trois catégories de pays pour l’exportation des technologies d’IA avancées :

• Accès privilégié : Les pays alliés traditionnels des États-Unis, comme l’Australie, le Japon, la Corée du Sud, et Taiwan, conservent un accès particulier aux technologies américaines.

• Restrictions renforcées : En revanche, des restrictions plus sévères s’appliquent à la Chine et à la Russie, surtout concernant les modèles d’IA « fermés » les plus avancés.

• Système de quotas : Le reste du monde se voit soumis à un système de quotas pour accéder à la puissance de calcul.

Les géants de l’IT réagissent

Cette initiative suscite une opposition marquée parmi les géants de la technologie américaine. Gina Raimondo, la secrétaire américaine au Commerce, défend pourtant ces nouvelles restrictions en soulignant leur caractère impératif pour la sécurité nationale. « Ces règles visent à protéger la technologie d’IA la plus avancée et à garantir qu’elle reste hors de portée de nos adversaires étrangers », déclare t-elle à ce sujet.

Pour autant, cette justification ne plaît pas à tout le monde. Ned Finkle, vice-président des affaires gouvernementales chez Nvidia, a par exemple exprimé des préoccupations quant à l’impact de ces règles sur l’innovation mondiale. « Cette règle inédite de ‘AI Diffusion’ menace de faire dérailler l’innovation et la croissance économique dans le monde entier », a-t-il affirmé. 

De son côté, Ken Glueck, vice-président exécutif d’Oracle, a ajouté que cette mesure contribue à « accroître les excès réglementaires » au détriment des intérêts américains et de ceux de leurs partenaires.

Un timing qui suscite la discorde

L’administration sortante se justifie : il s’agirait d’un « moment critique » dans les relations avec la Chine qui expliquerait l’urgence de ces mesures . Un haut responsable a même avancé que « chaque minute compte » dans le contexte géopolitique actuel. Bien que la réglementation entrait dans une période de consultation de 120 jours, elle était immédiatement applicable cependant.

Ce mouvement s’ajoute à un éventail de mesures restrictives prises depuis octobre 2022, qui incluent des limitations à l’exportation des équipements de fabrication de semi-conducteurs et des restrictions à l’accès des entreprises chinoises à la technologie américaine. 

Ces mesures reflètent la tension grandissante entre la volonté de la Chine d’atteindre une autosuffisance dans le domaine technologique, promue par le président Xi Jinping, et la détermination des États-Unis à préserver leur avance technologique.

Les inquiétudes de l’industrie

La Semiconductor Industry Association de Washington a exprimé ses craintes concernant le potentiel impact de ces restrictions sur la compétitivité américaine. L’association a par ailleurs souligné le fait qu’aucune consultation de l’industrie n’avait été faite lors de l’élaboration de ces nouvelles règles, qui pourraient pourtant avoir des conséquences significatives sur le leadership américain dans ce domaine.

Alors que les États-Unis s’engagent dans cette voie restrictive, l’écosystème technologique mondial devra s’ajuster, et les conséquences de ces mesures pourraient bien redéfinir le paysage de l’intelligence artificielle dans les années à venir.